(Interview Yonhap) Martine Biron, ministre québécoise des Relations internationales : «Je vois un bel avenir entre la Corée et le Québec»

SEOUL, 21 fév. (Yonhap) -- En Corée du Sud pour la première fois, la ministre des Relations internationales et de la Francophonie et la ministre responsable de la Condition féminine du Québec, Martine Biron, s'est confiée ce mardi à l'agence de presse Yonhap sur sa visite de trois jours dans le pays juste avant de prendre un avion pour Singapour. Elle a notamment fait part de son optimisme quant au futur des relations bilatérales.

Son séjour, qui avait commencé le 19 février, entrait dans le cadre d'une tournée dans la région Indo-Pacifique (Corée du Sud, Singapour, Indonésie et Japon jusqu'au 1er mars). Selon elle, cette première mission en Asie est l'occasion de renforcer les liens économiques avec une région du monde en pleine expansion.

«Mon premier arrêt, c'est Séoul. Et ce n'est pas innocent parce que je sens qu'on a une certaine accointance avec les Coréens. Et c'est pour ça que je commence par ici», a-t-elle expliqué dès le début de l'interview accordée à l'agence de presse Yonhap au Four Seasons Hotel Seoul.

Pour présenter ses trois portefeuilles ministériels, elle insiste sur le fait qu'ils sont «complémentaires» : «Notre politique étrangère au Québec repose sur deux piliers. D'abord, les échanges économiques. On a fait un virage économique, on optimise nos façons de faire et l'Asie, et au premier chef la Corée du Sud, est capitale dans nos échanges économiques.»

«Le deuxième pilier est la diplomatie identitaire, c'est-à-dire qui sommes-nous, nous les Québécois ? La Francophonie domine l'aspect francophone, cette langue que nous aimons et avec laquelle nous voulons aussi faire des affaires, nous voulons la privilégier et la protéger à l'intérieur du Québec mais aussi à l'étranger», poursuit-elle.

«Et l'égalité entre les hommes et les femmes, c'est une valeur très forte au Québec et nous voulons en faire la promotion. [...] Dans le fond, les relations internationales, c'est un échange. On ne peut pas juste prendre ou donner. Il faut vraiment échanger. Et sur la question de l'égalité entre les hommes et les femmes, c'est le travail que je fais.»

Sur le sujet de la condition féminine, la ministre Martine Biron a eu un entretien hier avec la ministre de l'Egalité hommes-femmes et de la Famille, Kim Hyun-sook. Elle a aussi rencontré le premier vice-maire de la capitale sud-coréenne, Kim Eui-seung, pour «un projet de collaboration entre Séoul et le gouvernement du Québec à différents niveaux : culturel, échanges universitaires, intelligence artificielle».

«Nous travaillons également sur les échanges économiques avec ce qui s'est passé durant les deux dernières années avec la pandémie et la politique chinoise du "zéro Covid". Aussi, la guerre en Ukraine a créé une nouvelle dynamique géopolitique. Et les pays autour de la Chine comme la Corée du Sud ont bénéficié de cette situation-là et les échanges économiques avec la Corée du Sud sont devenus plus importants avec le Québec», développe-t-elle.

Après avoir assisté hier soir à l'ambassade du Canada au dévoilement de la programmation de la Fête de la Francophonie en Corée 2023, elle rappelle : «Nous sommes membres de plein droit de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Le Québec est un Etat fédéré et c'est le seul endroit sur la scène internationale où nous avons un vote, un espace à nous. Alors, il faut prendre notre place au sein de la Francophonie et en faire la promotion.»

«Il y a des francophones en Corée. La Corée du Sud est un membre observateur. Cela mérite notre respect, mais cela mérite aussi d'inviter la Corée du Sud à être active sur ce qui a trait à la Francophonie», fait-elle remarquer. La république de Corée a rejoint l'OIF en qualité d'observateur en novembre 2016.

Elle a ensuite dressé un parallèle entre la Belle Province et le pays du Matin-Clair : «Je trouve qu'il y a des points communs avec ce que nous vivons au Québec, entre les Québécois et les Coréens. Quelqu'un m'a dit quand je suis arrivée que la Corée du Sud, c'est un peu la crevette entre deux baleines, la Chine et le Japon.»

«Et le Québec, c'est un peu la crevette entre deux baleines, c'est-à-dire le reste du Canada et les Etats-Unis, parce que nous sommes une goutte d'eau francophone dans un océan d'anglophones. Alors, nous essayons de prendre notre place, un peu comme la Corée le fait également. Alors, ça crée des points communs», ajoute-t-elle.

«Et ce que j'ai aussi senti chez les Coréens, c'est ce pragmatisme que nous, Nord-Américains, avons au Québec. Et je le retrouve ici. Je sens une certaine ouverture à dire les choses clairement comme elles sont. Et ça, je l'ai beaucoup apprécié. Alors, je vois un bel avenir entre la Corée et le Québec.»

A propos de la «Stratégie territoriale pour l'Indo-Pacifique» du Québec, qui a été dévoilée en décembre 2021, Martine Biron a confirmé que la Corée du Sud était l'un des piliers de cette initiative. Cette stratégie vise à renforcer et à renouveler l'action de la province canadienne dans la région.

Les grands axes de l'action sont le commerce et les investissements, la recherche et l'innovation, l'économie verte et le développement durable, l'attraction de talents et de la main-d'œuvre, ainsi que la culture et les échanges humains. «L'avenir est rose avec la Corée», prévoit-elle, grâce aux nombreuses opportunités, notamment dans les énergies durables et l'aérospatial.

La ministre conclut l'entretien en assurant que «vous (les Coréens) êtes nos amis. «Nous avons des liens avec la Corée depuis longtemps. Solidifions encore nos relations parce que nous avons beaucoup plus de points communs qu'on pourrait imaginer à première vue. C'est une richesse. Alors, je dis "Bonjour à vous, amis coréens ! Le Québec est avec vous !»

Martine Biron, qui effectue la première visite d'un ministre des Relations internationales du Québec sur le continent asiatique depuis 2018, a pris cet après-midi la direction de Singapour pour prendre part à la 1ère Conférence «Canada en Asie» afin d'y présenter la vision internationale du Québec pour l'Indo-Pacifique.

A Jakarta, elle participera au 7e Forum d'affaires et d'investissement du Conseil d'affaires Canada-Association des nations de l'Asie du Sud-Est (Asean) pour développer les relations avec les acteurs économiques et politiques du Sud-Est asiatique. La mission se terminera au Japon pour marquer notamment les 50 ans de la Délégation générale du Québec à Tokyo.

Martine Biron a été journaliste et analyste politique pendant 30 ans à Radio-Canada. Elle a fait son entrée dans la politique en se faisant élire députée des Chutes-de-la-Chaudière à l'Assemblée nationale du Québec en octobre 2022 sous les couleurs de la Coalition avenir Québec avant de se voir confier quelques semaines plus tard le poste de ministre au sein du gouvernement François Legault.

Propos recueillis par Xavier Baldeyrou

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