La liberté d'expression restreinte en Corée du Sud à cause des lois sur la diffamation, selon des rapports américains
21.03.2023 à 10h53 replay time00:40
WASHINGTON/SEOUL, 21 mars -- Le département d'Etat américain a fait part de ses préoccupations sur la restriction de la liberté d'expression engendrée par le recours aux lois sur la diffamation en Corée du Sud dans ses derniers rapports nationaux sur la situation des droits de l'Homme publiés lundi.
«La république de Corée est une démocratie constitutionnelle gouvernée par un président et un législatif monocaméral. Des observateurs ont estimé que l'élection présidentielle du 9 mars et les élections locales du 1er juin ont été libres et équitables», a déclaré le département d'Etat américain dans ses «Rapports 2022 par pays sur les pratiques en matière de droits de l'Homme», en faisant référence au nom officiel de la Corée du Sud.
Le rapport sur la Corée du Sud a cité comme questions majeures liées aux droits de l'Homme les restrictions sur la liberté d'expression dont le recours aux lois pénales sur la diffamation, la corruption du gouvernement, le manque d'enquête et de responsabilisation pour la violence basée sur le genre et les lois criminalisant le comportement sexuel consensuel entre adultes de même sexe dans l'armée.
A propos de la liberté d'expression, le rapport a noté : «La loi prévoit la liberté d'expression dont celle pour les membres de la presse et d'autres médias et le gouvernement respecte généralement ce droit. Néanmoins, l'interprétation et la mise en œuvre de la loi sur la sécurité nationale et d'autres lois et clauses de la Constitution ont limité la liberté de parole et d'expression et ont restreint l'accès à l'Internet.»
En particulier, le rapport a évoqué un incident de micro qui s'est produit pendant le voyage du président Yoon Suk Yeol à New York en septembre dernier. «Le président Yoon Suk Yeol a déclaré que le journaliste de (la chaîne de télévision) MBC pourrait mettre la sécurité du pays en danger en affectant ses relations avec des partenaires étrangers clés après que le journaliste a dévoilé un enregistrement dans lequel, selon lui, le président Yoon critiquait un corps législatif étranger.
Le rapport du département d'Etat a présenté ce scandale comme un cas de «violence et harcèlement». Il a ajouté qu'un député du Parti du pouvoir du peuple (PPP), parti au pouvoir, a porté plainte contre MBC en accusant le journaliste d'avoir diffamé et perturbé les fonctions présidentielles et qu'une coalition de vidéojournalistes a publié un communiqué selon lequel le bureau présidentiel a demandé à MBC de «faire quelque chose» pour arrêter la divulgation de l'enregistrement.
«Le 10 novembre, le bureau présidentiel a déclaré avoir interdit à MBC d'embarquer dans l'avion présidentiel pour couvrir un voyage à l'étranger (de Yoon) à cause de sa couverture déformée et biaisée à répétition de questions liées à la politique étrangère», a noté le rapport, tout en présentant une déclaration conjointe publiée par huit organisations d'employés de médias et décrivant la décision du bureau présidentiel comme un «défi clair à la Constitution qui garantit la liberté de la presse».
A propos des lois sud-coréennes destinées à sanctionner la diffamation ou la calomnie, le département d'Etat a souligné que «le gouvernement et des personnalités publiques ont utilisé les lois sur la diffamation et la calomnie qui définissent globalement et criminalisent la diffamation pour restreindre le débat public et harceler, intimider ou censurer l'expression des personnes privées et médias».
«Des ONG et avocats des droits de l'Homme ont continué à relever des cas où des hommes politiques, officiels du gouvernement et célébrités ont utilisé les lois sur la diffamation pour dissuader des victimes de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail de rapporter ou pour exercer des représailles contre ces victimes», a pointé le rapport.
Le rapport a cité comme exemples de tels cas les condamnations en juin dernier de l'ancien ministre de la Santé et du critique politique Rhyu Si-min pour avoir tenu de faux propos concernant l'ancien chef du département anticorruption du Parquet (actuel ministre de la Justice Han Dong-hoon) dans une interview à l'antenne en 2021 et la perquisition au bureau de la chaîne YouTube d'Open Sympathy TV après que le parti au pouvoir a porté plainte contre la chaîne pour avoir prétendument diffamé l'épouse du président, Kim Keon Hee.
Dans le domaine de la corruption, le rapport a inclus les grâces présidentielles accordées le 15 août dernier au vice-président de Samsung Electronics Lee Jae-yong et au patron du groupe Lotte Shin Dong-bin qui ont été impliqués dans le scandale de corruption qui a conduit à la destitution de l'ancienne présidente Park Geun-hye.
En outre, le rapport a mentionné pour la deuxième année d'affilée l'affaire de corruption liée à un projet immobilier à Daejang-dong, à Seongnam. «En novembre, la Cour centrale du district de Séoul a inculpé Kim Yong, le chef adjoint du think tank du Parti démocrate pour avoir prétendument accepté 600 millions de wons (417.000 dollars) du président par intérim de l'époque de Seongnam Development Corporation Yoo Dong-gyu pour financer la campagne présidentielle du candidat du parti Lee Jae-myung», a-t-il indiqué, tout en évoquant la mise en examen du député du PPP Kwak Sang-do, accusé d'avoir touché des pots-de-vin de Hwacheon Daeyu sous forme d'indemnités de départ de son fils d'un montant de 5 milliards de wons.
(Yonhap)
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